BIRD et IReF
Au-delà de la convergence Data, les prémices d’une transformation profonde du Métier Comptable ?
Projets BIRD et IReF – Les Essentiels
Contexte
Face à la demande croissante du régulateur en termes de reportings réglementaires et une exigence toujours accrue concernant la qualité de la donnée, exigence induite par BCBS239, la volonté actuelle du SEBC – Système Européen des Banques Centrales – est de standardiser et d’homogénéiser les données des reportings bancaires selon deux axes :
L’élaboration d’un dictionnaire de reporting intégré : BIRD (Banks’s Integrated Reporting Dictionary).
La mise en place d’un dispositif de reporting intégré : IReF (Integrated Reporting Framework) :
– Harmonisé au niveau Européen parmi 19 Banques centrales, un seul Dictionnaire, des règles de gouvernance (dérogations, qualité)
– Unique pour couvrir les besoins de tous, avec le même calendrier de remise unique.
– Stable : anticipation des besoins en données granulaires et statistiques pour le reporting et les statistiques internationales.
Ambitions
L’objectif de ces deux projets est de simplifier les processus de déclaration en permettant une collecte unique des données par l’intermédiaire du dispositif de reporting intégré.
Ces données seraient ensuite utilisées à des fins d’analyse et études spécifiques par les autorités européennes.
Impacts
Les modifications structurantes que ces 2 projets auront sur les architectures existantes, peuvent s’anticiper dès aujourd’hui avec un premier travail de gap analysis à effectuer.
Trajectoire
La cible prévisionnelle est en 2027 sans mesures coercitives incitant les banques à travailler sur ce projet, l’EBA et la BCE ont lancé des travaux sur la base du volontariat :
– EBA : Etude de Faisabilité T2 2021 (scope : données statistiques, de résolution et prudentielles)
– BCE : Questionnaires 2018 (principes) et 2021 (pratique, scope scénario central de déploiement sur les données statistiques).
Architecture SI
Aux reportings finalisés actuellement soumis, seront préférés une approche ERM (Entity Relationship Model) où des records de données (contrats, évènements, référentiels) seront envoyés séparément et combinées dans le SI BCE pour ensuite produire les reportings selon des règles de gestion harmonisées et définies par la BCE.

5 impacts majeurs sur les Process, Rôles et SI actuels
Ce chapitre vous propose une première Gap Analysis à destination du Senior management des différents impacts de ce chantier aux proportions significatives.
Préparation : A chaque point nous mettrons en évidence ce qui pourrait être incorporé dans les backlogs existants afin de rendre sa réalisation plus simple lorsque le projet sera à lancer.

1. Reporting granulaire / règle inhouse (*19) vs données granulaires et règles BCE
Fabrication autosourcée des reportings:
Actuellement, les Règles locales, rapprochements comptables et enrichissement de données de gestion sont appliquées dans un grand nombre de systèmes locaux (BFC, Magnitude, Evolan, développements internes…) avant d’être agrégées pour être envoyés dans des reportings pré formatés.
En cible, les données granulaires seront livrées brutes, et les règles de gestions appliquées par le régulateur.
Préparation :
– Cartographie des données et des règles de gestions (BCBS ou autres…). Centralisation de la documentation des règles de gestion.
– Infocentres: Intégration du futur besoin dans le sourcing et le design de vos entrepôts de données Finance et Risques.
Scope de soumission en forte augmentation :
– Le changement des seuils de matérialité impliquera un plus grand nombre d’entités Inscope des reportings actuels.
– Augmentation significative des données à fournir avec plus de 300+ data points granulaires et 150+ agrégées. Voir appendices pour plus de détails.
– Vue consolidée : Il sera nécessaire de fournir les données pour pouvoir construire les Reportings Entité et succursales, en solo et consolidé. Une simplification est attendue pour les groupes transfrontaliers
Préparation :
– Revue de votre process de consolidation / élimination pour pouvoir l’effectuer en central / depuis une entité particulière.
– Revue de la data quality pour les entités identifiées aujourd’hui comme non significatives mais qui pourraient rentrer dans le scope.
2. Calendrier de soumission trim./ mens./ annuel jusqu’à B45 vs B8/B12 mensuel
Le plan actuel prévoit une accélération de la fréquence de remise qui sera mensuelle pour les 19 pays membres.
Le délai de remise sera accéléré à B+8 ou B+12 contre B45 au plus tard actuellement.
Préparation :
– Identification des reportings faits de manière tactique.
– Etude de solution low coding (Alteryx/ PowerBI
– Travail sur l’élimination des écarts comptabilité gestion.
3. Questions/Réponses et Charge de la preuve :
Aujourd’hui, les reportings, les règles et les données sous-jacentes sont traités par le remettant et contrôlées/ajustées par le métier.
Avec IREF, les 2 premiers points seront réalisés par la BCE, les remettants devront justifier des incohérences dans les données, des écarts au niveau granulaire et des ajustements « pauvres » à différentes étapes du process.
Le traitement de la non-qualité sera renforcé : Il est prévu une re-soumission de toutes les données sur 3 exercices, ainsi qu’un abaissement des seuils de matérialité des erreurs…
Préparation :
– Mise à disposition d’outils granulaires pour expliciter les problématiques de dataquality
– Mise en place de process, chez le métier, pour améliorer la dataquality après chaque arrêté, lors d’une phase post production pour ne pas impacter le chemin critique
4. Le rôle du comptable et de la fonction de reporting en sera profondément modifié :
Remise : Calendrier et fréquence
La remise tous les mois, à une date très ambitieuse, B12 au plus tard, va entrainer une évolution forte des mécanismes d’arrêté de comptes, ceux-ci devront se terminer plus tôt.
Préparation :
Etude de différentes stratégies de publication
– Utilisation des données Mois précédent
– Rapprochement compta/gestion quotidien, ce qui impliquerait une remise quotidienne des flux dits « mensuels » (Intérêts courus, traitements de change…)
– Génération de la comptabilité directement à partir des stocks de gestion quotidiens et non plus en évènement comptables…
Contrôles des reportings
Les contrôles du reporting lui-même ou les contrôles inter-rapports seront faits avec des règles harmonisées exogènes à la banque qu’il faudra co-construire et répliquer dans les SI afin de pouvoir expliquer les questions du régulateur. La charge de la preuve sera donc plus lourde pour les métiers, qui n’auront pas forcément dans leurs SI la version des règles utilisées par le régulateur.
Préparation :
– Lors des chantiers sur les contrôles comptables ou le fast close en cours, identifier des axes d’amélioration pour diminuer les corrections en top conso en bout de chaine et pauvres en information de gestion
– Lors des chantiers BCBS, identifier toutes les règles « par défaut » qui corrigent une absence de données afin de les remonter en amont de la chaîne.
Rapprochement avec la culture de la donnée : Les comptables, acteurs de la correction en amont
Aujourd’hui, les calendriers de remises sont déjà très tendus pour les fonctions reportings. Des ajustements peuvent être passés à un niveau assez pauvre par les experts métiers.
Préparation :
– Adapter la gouvernance actuelle pour renforcer les moyens d’actions suites aux arrêtés afin qu’une correction ponctuelle le soit vraiment et que la rootcause de celle-ci soit corrigée dès sa détection.
– Acculturer les métiers à la donnée en leur mettant à disposition des outils de BI permettant une analyse granulaire des données sous-jacentes qu’ils manipulent. Ils sont les plus à même de pouvoir proposer des plans d’action sur une non-qualité.
– Le rapprochement de la Finance avec les autres métiers (Risques…) devient primordial : les changements d’organisation impliqués par IFRS9 16 17 doivent être consolidés et amplifiés pour que les mentalités autour de la donnée soient alignées.
5. SI, Data Quality et Gouvernance Changement d’échelle:
Ce chantier sera sans doute le plus consommateur de budget avec la mise en place de l’architecture nécessaire pour répondre au besoin, mais également la gouvernance qui en assurera la solidité.
Data : BIRD impliquera une convergence toutes sources, rapprochement et dataquality qui ne pourront plus être occultés par des règles par défaut. Le volume de données mensuelles, rappelons-le, impliquera des besoins colossaux en espace et capacité de traitement.
Agilité et évolutivité devront être travaillées pour répondre au calendrier contraint de remise, mais également pour pouvoir s’adapter aux évolutions qui ne manqueront pas de se produire à un rythme plus soutenu.
Charge conséquente sur le parallel Run qui ne manquera pas de se produire avant ou en 2027 puis lors de chaque évolution majeure des règles. La profondeur d’historique doit être considérée avec soin et doit permettre la reprise d’une donnée depuis sa première soumission le cas échéant.
Préparation :
– Les entrepôts Risques/Finance sont maintenant une réalité pour beaucoup d’entreprises. Lors de leur évolution, commencez à envisager les scénarios BIRD intéressants : Incorporation des fonctions de traitement actuelles des applicatifs de reporting, utilisation d’une autre couche de traitement en aval, alimentation en Y et rapprochement pour les parallel Run…
– Contrats éditeurs. Si BIRD / IReF suit sa trajectoire, il est probable que tout ou partie des progiciels éditeurs ne seront plus usités après 2027. Une revue des contrats actuels pourrait être source d’économie à l’approche de l’échéance.
Conclusion
BIRD et IReF s’annoncent comme un chantier titanesque, non seulement par l’ampleur du SI et des Data à mobiliser, mais par la dimension organisationnelle sous-jacente.
Les objectifs principaux
- Réduction des temps de production des reporting et des coûts de mise en place des évolutions réglementaires
- Cohérence des données entre les différents reportings
- Homogénéité des modèles de données pour compiler les statistiques requises par les autorités au niveau Européen.
- Homogénéiser les règles de transformations des données et assurer une piste d’audit entre les données granulaires et agrégées
Les enjeux
Certaines banques ont déjà anticipé les travaux à mener en s’assurant d’options structurantes concernant leur architecture SI avec par exemple la mise en place de DWH, de Datalake et de référentiels uniques.
L’une des principales difficultés du projet BIRD, à l’heure actuelle, est que les travaux qu’il implique sont massifs et structurants pour les banques et sans certitude qu’ils aboutiront à une cible utilisée. :
Massifs : La quantité de données impliquées requerra une architecture de collecte de type entrepôt de données, cube ou datalake qui nécessite des investissements IT conséquents.
Structurants : L’alimentation d’une telle architecture va nécessiter de redescendre les données, règles de gestion, process d’ajustement dans ce réceptacle à partir des applications disparates internes ou progicielles qui les produisent actuellement.
Data Ownership : Les sujets autour de la gouvernance de la donnée vont alors prendre une dimension particulière car la traçabilité devra être assurée de bout en bout : du Système opérant au concentrateur du Régulateur.
Gap analysis et Acculturation
Cependant, des travaux de gap-analysis peuvent déjà être menés :
- Les banques peuvent ainsi commencer à challenger leur propre dictionnaire de données (rôle des data owner) avec pour objectifs de :
- S’assurer que l’alimentation de ce dictionnaire n’est pas éloignée de la cible BIRD et qu’il permet de mapper les données pour tous les reporting requis
- Mettre en place des outils et solutions cibles permettant de réduire les coûts de production des reportings.
- Capitaliser sur les projets internes tout en essayant de ne pas s’éloigner de la trajectoire de BIRD
- Faire converger les filières risque et finance
- Traiter en amont les problèmes de data quality existant sur les données déjà identifiées
La data devenant la clé partagée avec le régulateur, les métiers qui la consomment doivent d’ores et déjà s’habituer à la manipuler au niveau granulaire. Cette acculturation d’ici 2027 devrait faire émerger de nouvelles pratiques, des gouvernances plus étroites autour de la qualité et une meilleure culture d’analyse qui permettra de faire évoluer mentalités et organisations en vue de s’adapter à la nouvelle manière de correspondre avec le régulateur. Cette appropriation progressive devrait permettre de conduire la transformation de la fonction Finance d’une manière bienveillante et participative pour les principaux acteurs métiers de ces organisations. L’approche Agile par Test and Learn pourrait être un vrai avantage pour diminuer les coups et constituer une Tribu qui pourra s’intégrer parfaitement lors du lancement du volet SI du projet.
Principaux états dans le scope BIRD/IRef & data points demandés

