L’Open Banking, quels enjeux pour les institutions financières ?

Le secteur bancaire n’en finit pas de se transformer… L’Open Banking est-il devenu une obligation pour les banques depuis janvier 2018. De quoi s’agit-il ?

Basée sur le même principe que l’Open Innovation (innovation ouverte), cette technologie pousse les banques à partager leurs données avec d’autres acteurs du secteur financier. La banque perd ainsi son monopole création-distribution d’offres de services financiers aux clients. Elle devient une simple plateforme, offrant une ou plusieurs composantes sur cette chaîne de valeur, mais peut s’appuyer sur d’autres acteurs du marché pour repenser son écosystème.

L’Open Banking se traduit concrètement par l’ouverture des systèmes d’information bancaires via l’usage des API (Application Programming Interface), des interfaces de programmation permettant à des développeurs de créer des applications et des services novateurs pour les institutions financières. Les processus bancaires devenant ainsi interconnectés entre les différents acteurs (banques, entreprises financières, fintechs, agrégateurs de comptes, initiateurs de paiement). Une petite révolution dans l’écosystème bancaire, dans lequel toutes les informations étaient jusqu’ici cloisonnées et sécurisées.

Mais l’Open Banking va bien au-delà de cette transformation digitale. Cette innovation, permise par la réglementation et métamorphosant le marché, engendre de nouveaux services jusque-là inconnus du monde de la finance. 41 % des Français seraient consentants à partager leurs données avec des entreprises en échange d’une contribution financière… Ce pourcentage grimpe à 59 % pour les 25-34 ans. Récupération automatique de données clients, utilisation potentielle de ces données moyennant réduction de frais bancaires ou opérations financières offertes, l’Open Banking ouvre ainsi la voie à de nouveaux usages et terrains de jeux insoupçonnés des banques.

Un positionnement à repenser pour les banques traditionnelles

Face à cette transformation, les banques commencent à repenser leur business model. L’objectif étant d’intégrer ces nouveaux acteurs dans leur propre écosystème et proposer ainsi de nouveaux produits et nouvelles offres. La marche vers le BAAS (Bank As A Service) est en cours.

Dans ce nouvel écosystème, trois approches différentes peuvent être identifiées :

  1. Producteur : la banque fournit ses produits à une plateforme tierce de distribution.
  2. Fournisseur : la banque fournit des modules permettant à une plateforme tierce de concevoir ses produits et services.
  3. Interface : la banque distribue tout type de produits tiers via sa propre plateforme de distribution.

Historiquement, le modèle producteur/distributeur a toujours existé dans les grands groupes bancaires (BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole, BPCE, La Banque Postale). Ces groupes s’appuient en général sur un réseau de distribution dense et large, certaines offres particulières étant logées dans des filiales spécialisées. Les offres de leasing, affacturage, crédits à la consommation sont par exemple portées par des entités juridiques indépendantes.

De même, le modèle de la relation fournisseur n’est pas nouveau : ces mêmes enseignes offrent des plateformes de traitement de flux financiers pour les acteurs du marché en marque blanche (asset managers, teneurs de compte, brokers, etc.). Ces approches ont été lancées dans une logique d’économie d’échelle sans stratégie particulière au niveau du business model existant.

Aujourd’hui, l’Open Banking questionne ces organisations et impose une réflexion sur un nouveau business model à adopter ainsi qu’un target operating model à mettre en place.

La réglementation comme accélérateur du phénomène

En Europe, cette réflexion a été accélérée via différents textes réglementaires. L’émergence de nouveaux acteurs de paiement, avec un statut juridique spécifique, a été portée par la réglementation DSP 1 (Directive sur les Services de Paiements 1). Le texte de loi a été adopté en 2007 pour une mise en œuvre à l’échelle européenne en 2009. Il a supprimé le monopole des institutions bancaires pour les prestations de services de paiements. Les banques doivent dorénavant cohabiter en créant des partenariats avec ces acteurs.

En France, Crédit Mutuel Arkéa a été précurseur de cette transformation en développant dès 2009 une activité indépendante de services de paiement sous la marque Monext, en partenariat avec la plateforme MasterCard. Monext est depuis devenu un des quatre premiers fournisseurs de solutions de paiement en Europe.

Par la suite, Arkéa a enrichi son écosystème avec la mise à disposition de solutions plus globales en marque blanche : SI (Allianz bank), plateforme de distribution (RCI Bank and services), Core Banking System (Fortuneo).

Par ailleurs, la réglementation DSP 2, déployée en 2019, a accéléré le développement des assistants personnels et des offres d’agrégation de comptes, accentuant la perte de monopole de la distribution bancaire par les acteurs historiques. Crédit Mutuel Arkéa, a par exemple développé la nouvelle plateforme Max, un assistant personnel qui agrège l’ensemble des produits bancaires déjà détenus par le client et propose de nouveaux produits et services bancaires.

D’autre part, le texte européen GDPR (General Data Protection Regulation), entré en vigueur en 2018, a été bénéfique à l’expansion de ces offres de services. La mise en place de ce cadre juridique, dédié à la protection des données à caractère personnel, a considérablement rassuré le client.

Autres modèles de réussite, le Crédit Agricole Store, l’initiative Open Banking lancée par le groupe Crédit Agricole. La plateforme de services bancaires Crédit Agricole Store partage ses données avec les développeurs de la start-up Les Digiculteurs. Cette coopérative numérique a donné naissance à plus de quarante applications bancaires innovantes pour smartphones et tablettes numériques…Et constitue un véritable laboratoire d’innovations au service de la transformation digitale des caisses régionales.

Enfin, citons la solution récente proposée par la fintech Particeep. : Les banques et les assurances donnent un accès contrôlé et sécurisé à leurs offres et autorisent des partenaires distributeurs (courtiers et sites e-commerce) à commercialiser services bancaires et d’assurances sur toute interface web ou mobile.

Souscriptions et commercialisations numérisées, industrialisées et quasi-instantanées de produits et services financiers, l’interconnexion entre les différents partenaires via l’Open Banking, drainée par les besoins client, est bénéfique pour tout le monde, à commencer par les banques.

Des barrières qui restent néanmoins bien présentes

Malgré cette réglementation incitative et la dynamique apportée par les nouveaux acteurs du marché, la route est encore longue. Certes les banques ont bien lancé quelques initiatives, à l’image des exemples cités précédemment, mais la révolution Open Banking reste encore à mener. Le vrai sujet est avant tout celui de la transformation du business model : les banques doivent définir un plan avec des objectifs quantifiés par rapport à l’intégration de l’Open Banking dans l’ensemble de leurs activités et définir une feuille de route claire, réaliste et largement partagée pour atteindre ces objectifs. Cette transformation va bien au-delà de l’organisation ou l’évolution du système d’information. C’est donc bien un nouveau projet d’entreprise à mettre en place.

D’autre part, un travail de communication et d’information doit être initié au plus tôt.

80 % des Français se disent préoccupés par le fait que leurs données soient utilisées par des organisations dans le cadre d’initiatives non liées au Covid-19². En outre, la grande majorité des consommateurs semblent désorientés par toutes ces nouvelles offres financières et cette multiplicité des acteurs. Un accompagnement, avec explications pédagogiques, couplé à une sécurisation toujours plus forte des informations personnelles et bancaires, est une étape incontournable.

Le passage vers l’Open Banking semble ne pas être une option pour les banques. Soutenu par les régulateurs européens, l’Open Banking transformera le modèle de la banque de détail, tout comme l’e-commerce (modèle Amazon) a révolutionné le commerce de détail. Chez Harwell, nous pensons que la problématique qui se pose pour une banque n’est plus de savoir s’il convient ou non d’adopter un modèle Open Banking. Comment mettre en place un tel modèle ? Jusqu’où aller dans l’ouverture de son SI et de ses données ? À quel rythme ? Sur quelles activités bancaires ? Quels bénéfices peut-elle en tirer ? Voilà quelques questions clefs qu’une banque devrait se poser. Harwell a la capacité de vous accompagner dans cette réflexion. Et si nous en parlions ensemble ? 

Anacredit
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Sébastien DUPORTAL
Partner, Responsable de la Practice Assurance, Retail & Digital

Ithier DE LA SALLE
Manager Assurance, Retail & Digital

Mahdi HADJ TAIEB
Consultant

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