Le RPA
Le RPA, quels enjeux pour les institutions financières ?
Le RPA pour Robotic Process Automation (automatisation de processus robotisés)[1] consiste à automatiser l’exécution de processus métiers digitaux, répétitifs, et ne nécessitant pas une prise de décision complexe. Il s’agit, très concrètement, de programmer des logiciels, appelés robots, afin d’interagir avec d’autres logiciels et automatiser ainsi les actions répétitives et chronophages effectuées jusque-là par l’humain.
Le RPA n’est pas le premier concept qui s’attaque au sujet de l’automatisation des tâches et d’efficacité opérationnelle. Ces enjeux sont adressés depuis plus de 10 ans par le BPM (Business Process Management). Le RPA s’inscrit dans cette lignée, mais en adoptant une approche opérationnelle différente. La démarche projet RPA est plus immédiate, moins onéreuse et permet de répondre à une palette élargie de processus et tâches à automatiser. En un mot, la mise en œuvre opérationnelle est facilitée (moindre intrusion SI, management de tâches vs processus). En contrepartie, une gouvernance spécifique est attendue afin de réussir un déploiement de la capacité RPA.
Selon une étude de Grand View Research[2], le marché mondial de la RPA est estimé à 357.5M USD en 2017. La croissance attendue sera de 31% par an d’ici 2025 pour dépasser 3 Mds USD. Le marché des fournisseurs RPA est en constante évolution, en témoigne le rachat de l’éditeur français Contextor par le groupe allemand SAP qui vient d’être annoncé. A côté, trois autres éditeurs tirent aussi leur épingle du jeu : BluePrism qui a été introduit en bourse en 2016 mais aussi UiPath et Automation Anywhere. Le mouvement de consolidation du marché devrait se poursuivre au cours des prochaines années.
[1] Le RPA inclut généralement le RDA (Robot Desktop Automation) : il s’agit dans les 2 cas d’appliquer de manière automatisée des processus métier, soit en reproduisant les gestes d’un opérateur sur son propre poste de travail (RDA) soit en exécutant des traitements sur le serveur sans intervention humaine (RPA au sens strict).
[2] Grand View Search, Robotic Process Automation (RPA) Market Size, Share & Trends Analysis Report By Type (Software, Services), By Application (BFSI, Retail), By Organization, By Services, By Region, And Segment Forecasts, 2018 – 2025

Le secteur financier représente près du quart du marché mondial de déploiement de cette technologie selon l’étude de Grand View Search. Les institutions financières ont été des adeptes précurseurs de cette technologie en raison des gains identifiés tant pour les collaborateurs, avec la réduction des tâches répétitives et chronophages, que pour l’entreprise, avec des gains de productivité. Grâce aux robots qui assurent les tâches en 24h/7j, les banques opérant sur les places de marchés dans différents continents peuvent se prémunir des contraintes géo-temporelles pour une ré-internalisation efficace et centralisée des processus en question. La simplicité d’intégration de la technologie permet également d’ajouter des contrôles additionnels, ce qui réduit les risques opérationnels et améliore le pilotage des processus. Le développement du RPA est enfin bénéfique au client avec une durée d’exécution des tâches réduite et une meilleure qualité des services rendus.
Comment développer une telle technologie au sein des institutions financières ?
Il faut penser le RPA comme une technologie socle, une brique dans le large éventail dont peut se doter une entreprise afin d’améliorer son efficacité opérationnelle. L’approche doit donc tenir compte de cet aspect en pensant l’adoption RPA dans le cadre d’un vaste programme de transformation digitale. Ce programme sera décliné sur différents cas d’usage, chacun étant considéré comme un projet à part entière. Au regard de la facilité d’intégration de la technologie RPA, une démarche agile est plus que souhaitable avec des cycles courts et des itérations, qui permettront d’entrevoir rapidement les résultats et faciliter ainsi l’adoption par les collaborateurs.
Enfin, dans un objectif de sensibilisation et de montée en compétences, il est recommandé de commencer par un, voire deux cas d‘usages pilotes permettant de tirer les leçons quant à la démarche projet mais aussi la maturité de l’organisation face à l’adoption de cette technologie. Les institutions financières explorent aujourd’hui le RPA dans les domaines de l’entrée en relation client (certains contrôles KYC), les reportings financiers (certains processus de réconciliation comptable), les achats…
Démarche d’adoption et de déploiement RPA
La réussite d’un projet RPA repose également sur une bonne préparation du fonctionnement en rythme de croisière avec une gouvernance adaptée. Il convient en premier lieu de définir une matrice de responsabilité avec des règles entre les métiers et la DSI et notamment qui est responsable des robots. Il faut également prévoir un bon partage d’informations entre les différents métiers sur les cas réussis et les difficultés rencontrées. Des KPIs doivent être mis en place pour piloter la performance des processus automatisés. Enfin, la gouvernance doit adresser les questions de conformité et de gestion du risque opérationnel en particulier la cybersécurité, en s’assurant d’un dispositif de contrôle adapté.
Il convient de mettre en place une organisation dédiée pour le processus de maintenance et d’évolution : la DSI doit prendre en charge la gestion du matériel et du logiciel, assurer la sécurité de l’environnement IT ainsi que la maintenance opérationnelle. De leur côté, les métiers endossent le rôle de « process owners », ils sont responsables de l’identification et de l’automatisation des processus automatisables, de la mesure des impacts, du contrôle de conformité et de la conduite du changement. En termes de maintenance, il est important de bien inscrire les robots dans les cartographies applicatives de la DSI afin d’anticiper les impacts d’évolution des SI existants sur le fonctionnement des robots et limiter ainsi le risque de « shadow IT ».
Afin de gérer au mieux les différents projets RPA dans les différents métiers, et de mutualiser les expertises associées, nous recommandons de mettre en place un Centre de compétences dédié avec des business analysts et experts processus, pour cartographier l’existant et définir la cible métier, ainsi que des experts techniques qui vont répondre aux problématiques d’infrastructure, effectuer le paramétrage des robots et gérer la maintenance. Ce centre adressera toute la chaine de valeur de mise en place d’un projet RPA avec différents niveaux d’offre de services. Le gain est double : développer un vrai savoir-faire interne sur le sujet, un noyau dur qui sensibilisera les équipes au sein de l’établissement, et mutualiser les coûts projet et post phase projet (licences logicielles, infrastructure et expertise).
Un dernier facteur clé de succès : la conduite du changement
En effet, l’automatisation d’une partie des processus engendre des évolutions significatives pour les collaborateurs et doit s’accompagner d’une véritable réflexion sur leurs tâches, leurs missions et leurs compétences. Si l’automatisation permet de renforcer la dimension valeur-ajoutée de leur travail, elle peut aussi faire leur craindre une disparition de leurs tâches et donc de leur emploi. L’évolution d’un mode d’exécution à un mode de réflexion et de support requiert le développement de nouvelles compétences. Cette transformation nécessite donc une communication et un programme d’accompagnement et de formation. Cet effort de conduite du changement ne doit pas être sous-estimé en termes de calendrier – changer les « mindsets » prend du temps – et en termes d’investissement – prévoir un budget pour la communication et la formation.
En conclusion, le RPA peut être déployé dans une démarche profitable pour tous, si toutes les dimensions, et notamment humaines, sont bien prises en compte dans le projet.
